L’IA médicale en France : 6,9 millions d’euros investis dans le projet PARTAGES
Publié le vendredi 07 février 2025 à 15h22
Europe IA InstitutionsAvec plus de 2,5 milliards d’euros investis depuis 2018, la France a structuré un fort écosystème d’intelligence artificielle. Mais face à la concurrence des États-Unis et de la Chine, le gouvernement veut accélérer en renforçant les infrastructures, la formation et l’intégration de l’IA dans les services publics.
Un écosystème en plein essor
En six ans, la France est passée de la 13ᵉ à la 5ᵉ place du Global AI Index, et s’impose comme le premier hub européen en IA générative. Avec plus de 1 000 start-ups spécialisées, dont Mistral AI, Hugging Face et Dataiku, elle attire aussi les investisseurs : 1,9 milliard d’euros levés en 2024, et des engagements financiers d’ampleur, notamment de Microsoft (4 milliards d’euros), Amazon (1,2 milliard) et Telehouse (1 milliard). Les grandes entreprises ne sont pas en reste : Thales, Iliad ou encore CMA-CGM se positionnent sur le marché, tandis que la France demeure la première destination européenne pour les investissements étrangers en IA, selon le baromètre EY.
Nouvelles priorités stratégiques
Malgré ces avancées, la concurrence mondiale s’intensifie. Pour éviter un retard technologique, le gouvernement mise sur quatre axes prioritaires :
- Renforcer les infrastructures : Extension des supercalculateurs Jean Zay, Adastra et Alice Recoque, soutien aux acteurs français du cloud et développement de 35 sites dédiés aux centres de données.
- Former et retenir les talents : Objectif 100 000 personnes formées par an d’ici 2030, développement des IA Clusters, simplification des visas pour les chercheurs étrangers.
- Accélérer l’adoption de l’IA : Incitations pour les entreprises et intégration de l’IA dans les secteurs stratégiques.
- Garantir une IA fiable et sécurisée : Création de l’Institut national pour l’évaluation et la sécurité de l’IA (INESIA), chargé de la régulation et de l’évaluation des modèles d’IA.
L’État veut généraliser l’IA dans l’administration
L’intelligence artificielle est aussi appelée à jouer un rôle dans la transformation des services publics. Plusieurs ministères expérimentent déjà des outils basés sur l’IA :
- Éducation : recours à des assistants pédagogiques et automatisation de certaines tâches administratives.
- Justice : anonymisation des décisions et transcription assistée des audiences.
- Intérieur : utilisation de l’IA pour l’analyse des images de vidéosurveillance et la détection des feux de forêt.
- Emploi : développement d’algorithmes d’appariement entre offres et demandes d’emploi.
L’IA au service du diagnostic et de la recherche médicale
L’essor des modèles d’intelligence artificielle ouvre de nouvelles perspectives en matière de détection et de prévention des maladies. Dans ce cadre, le projet PARTAGES, porté par le Health Data Hub et financé à hauteur de 6,9 millions d’euros, réunit 20 hôpitaux et 10 équipes de recherche, en partenariat avec Mistral AI. Son objectif est de développer un modèle de langage spécialisé en santé, adapté au français, pour assister les professionnels dans l’analyse des données médicales et la rédaction de comptes rendus. D’autres initiatives visent à améliorer l’interprétation des examens médicaux. L’Assurance Maladie et la Haute Autorité de Santé lancent ainsi une expérimentation sur l’usage de l’IA dans l’analyse des électrocardiogrammes (ECG). L’objectif est de faciliter l’accès à cet examen pour le dépistage des maladies cardiovasculaires et d’en améliorer l’interprétation en médecine générale.
L’IA transforme les pratiques médicales, mais son adoption suppose une formation adaptée des professionnels de santé. Dès la rentrée 2025, l’apprentissage du numérique et de l’IA deviendra obligatoire dans le premier cycle des études médicales. Un investissement de 119 millions d’euros vise à former 500 000 professionnels en cinq ans, incluant médecins, personnels paramédicaux et ingénieurs en santé numérique.
Un leadership européen à consolider
Si la France affiche des ambitions élevées, plusieurs défis restent à relever. L’accès aux talents, la consommation énergétique des modèles d’IA et la régulation des usages figurent parmi les questions. Sur ce dernier point, l’IA générative suscite des préoccupations croissantes, notamment sur la protection des données et les biais algorithmiques. Avec la création de l’INESIA, premier institut européen dédié à la sécurité de l’IA, la France entend se positionner dans la gouvernance mondiale de l’intelligence artificielle.
Au-delà du territoire national, la France veut jouer un rôle dans la stratégie européenne. Elle s’appuie sur :
- L’initiative AI Factories, qui vise à structurer un réseau de hubs spécialisés en IA en Europe.
- La Boussole de Compétitivité, lancée par la Commission européenne pour harmoniser les stratégies IA des États membres.
- Une IA durable, avec un effort sur la sobriété énergétique et l’intégration de critères environnementaux dans le développement des technologies.
Alors que la compétition mondiale s’intensifie, la France doit encore prouver sa capacité à transformer ses avancées en résultats. L’adoption massive de l’IA dans l’économie et l’administration pourrait être un accélérateur, mais le défi reste de concilier innovation, souveraineté et cadre éthique robuste.
Faire de la France une puissance de l’IA – Comité interministériel de l’Intelligence artificielle – 6 février 2025