EHDS : un calendrier de 2 à 6 ans et 800 M€ pour la mise en application du nouveau règlement
Publié le lundi 29 avril 2024 à 15h18
Data Europe InstitutionsLe Parlement européen a adopté le 24 avril le règlement de l'espace européen des données de santé (EHDS). Première déclinaison sectorielle, l'EHDS est un axe stratégique des espaces européens sectoriels de données qui vise à créer des marchés uniques de grande taille au sein de l'UE.
Libérer le potentiel des données de santé
Présenté le 25 avril par Hela Ghariani, déléguée au numérique en Santé, Emilie Passemard et Isabelle Zablit, directrices de projets à la DNS, et Fulvia Raffaelli, responsable de l’unité santé numérique de la direction générale de la santé de la Commission européenne , le règlement européen EHDS est un aboutissement de deux années de concertation et construction au sein des 27 pays de l’Union Européenne.
Fulvia Raffaelli a tenu à rappeler que le règlement s’inscrit dans le cadre de la décennie numérique européenne et vise plusieurs objectifs clés : “Les espaces européens sectoriels de données visent à créer un marché unique de grande taille dans l’UE”. Selon elle, cette initiative est cruciale pour faciliter l’accès aux données de santé pour les citoyens, en permettant leur stockage dans tous les pays européens, mais pour les chercheurs en santé publique. Il s’agit d’un “accès direct, gratuit et facile au dossier médical électronique”. Pour mieux répondre aux besoins de leurs patients, Fulvia Raffaelli a également mis en avant le besoin des professionnels de santé d’accéder à des données de haute qualité et les plus complètes possibles. Elle a enfin souligné la nécessité d’encadrer et d’harmoniser ces échanges de données conformément aux règles européennes en matière de protection des données et de droit de la concurrence.
Bénéfices attendus :
➡️ pour les patients, le règlement relatif à l’EHDS promet une meilleure prise en charge transfrontalière et un contrôle renforcé sur leurs données de santé ;
➡️ pour les professionnels, il simplifie l’accès aux dossiers médicaux, facilite la recherche grâce à une disponibilité accrue des données, et favorise l’innovation en simplifiant l’accès au marché européen.
Points clés du règlement relatif à l’EHDS
- Partage des données en Europe et droits des patients :
Dans le cadre du partage des données en Europe et des droits des patients, plusieurs mesures sont mises en place pour faciliter l’accès des citoyens à leurs données de santé et améliorer la qualité de la prise en charge transfrontalière des patients. Ces mesures incluent notamment un accès direct aux dossiers médicaux, le droit d’opposition au traitement des données, ainsi que des règles de localisation des données. De plus, les professionnels de santé bénéficieront d’un accès simplifié aux données des patients, avec des catégories minimales de données partagées à l’échelle de l’UE, et ce via un point de contact national (dénommé H-DAB) .
Avec 13 États membres déjà impliqués et la France connectée à 9 pays de l’UE pour l’échange de données médicales ( via le service Sesali et l’infrastructure européenne MyHealth@EU : Espagne, Luxembourg, Portugal, République Tchèque, Croatie, Estonie, Malte et Lettonie), ce réseau devrait s’étendre à 30 pays d’ici 2030.
- Construction d’un marché unique des DPI :
Les premiers chapitres du règlement se concentrent sur deux éléments : l’interopérabilité et la traçabilité des accès. Ces critères définissent qui peut se connecter, pour quelle raison et à quel moment il peut le faire. Ainsi, pour pénétrer le marché de l’UE, les éditeurs de logiciels doivent garantir que leurs produits respectent ces normes. Cette conformité est évaluée via une procédure d’autocertification des logiciels de dossier patient informatisé (DPI), des dispositifs médicaux et des intelligences artificielles (IA) liés à ces systèmes.
- Accélération de l’usage secondaire des données à l’échelle européenne :
Les données de santé détenues par les acteurs du secteur de la santé et du médicosocial doivent être rendues accessibles pour une réutilisation secondaire. Cela passe par
- la connaissance des données disponibles par les utilisateurs à travers des catalogues de données décrites par les détenteurs,
- le maintien des procédures d’accès nationales existantes ;
- le respect des conditions réglementaires pour la réutilisation des données.
Le règlement EHDS prévoit, par ailleurs, la création d’un nouveau rôle de régulateur dans chaque État membre, chargé de superviser l’accès aux données de santé et de contrôler leur réutilisation.
De plus, une infrastructure technique sera mise en place à l’échelle européenne pour faciliter le partage des données.
- Gouvernance européenne renforcée sur les enjeux du numérique en santé :
Le règlement renforce la gouvernance européenne et nationale pour le numérique en santé, en exigeant la création d’autorités nationales compétentes dans chaque État membre pour superviser son application. Il remplace le réseau “eHealth Network” par un comité de l’EHDS, où les parties prenantes seront impliquées dans la prise de décision. Pour une collaboration efficace entre les États membres et les parties prenantes, cette gouvernance associera :
- un comité de l’EHDS ;
- un forum des parties prenantes ;
- des comités de pilotage ;
- et la Commission européenne.
Préparer l’écosystème pour l’application du règlement
Hela Ghariani souligne que le règlement EHDS entrera en vigueur à l’automne 2024, avec une mise en application étalée sur deux à six ans. En France, il s’appuiera sur les pratiques existantes pour l’utilisation primaire et secondaire des données de santé, d’où l’importance, selon la déléguée au numérique en Santé, de se préparer en capitalisant sur les acquis actuels. Les préoccupations concernant l’accès restreint aux données de santé ont été portées à l’attention de la Commission européenne. Les établissements bénéficieront d’une protection proportionnelle au niveau de risque, dans le cadre des mesures de cybersécurité.
Les dates clés du calendrier :
- Entrée en vigueur du règlement en Automne 2024, puis entrée en application progressive
- + 2 ans pour les actes d’exécutions adoptés par la Commission Européenne,
- + 4 à 6 ans pour les articles relatifs à l’usage primaire des données de santé (MyHealth@EU)
- + 4 ans pour les articles relatifs à l’utilisation secondaire des données (HealthData@EU)
- + 6 ans pour la certification des dossiers médicaux électroniques
- + 2 ans pour les autres dispositions.
L’EHDS, qui représente un pilier crucial de la souveraineté numérique de l’Europe en matière de santé, vise ainsi à offrir une impulsion européenne aux initiatives nationales. Ses enjeux stratégiques étant considérables, son application au niveau des États membres se construira avec les différents acteurs de l’écosystème de la santé.